Si l’expression a moins d’une quinzaine d’années, le concept, lui, est vieux comme le monde. Et ce n’est pas une expression ce coup-ci. Il a suffit qu’une seule planète se forme après le Big Bang pour qu’on se retrouve, quelques temps plus tard, avec une infinités d’autres. Je crie au plagiat. Un être humain apparaît ? Paf ! Des milliers d’autres. Un champ de blé ? Paf ! Des chocapics. Scandaleux. Mais il y a du bénéfice à faire et, ça, tout le monde l’a comprit.

L’industrie de la musique − si l’on peut encore la nommer ainsi − a la fâcheuse tendance de cloner sans cesse ses produits jusqu’à l’étouffement. De fait, elle s’efforce depuis quelques années de nous marteler le cerveau avec une boîte à rythmes et une paire de nichon. Pour le public féminin, une ou deux chansons d’amour aussi sincères qu’un cambrioleur prit en flagrant délit et le tour est joué. Le morceau aussi malheureusement. Suite à un accord tacite avec les chaînes nationales, le petit écran nous permet dorénavant de vivre en direct la naissance des ces étoiles montantes au talent si incroyable que je ne décroche plus de ma télé depuis que je l’ai retourné. De l’autre coté, c’est passionnant comme disait Boris. Si j’ignore le nom et le visage de notre fabuleuse égérie de la semaine, je connais, en revanche, par cœur les références de mon téléviseur, ce qui s’avèrera utile lorsque je souhaiterai le revendre afin de m’offrir les services d’un tueur à gages pour liquider l’idole hebdomadaire citée précédemment.

Le grand écran n’est pas en reste non plus, les suites de suites se multiplient et j’attends avec impatience le retour de la vengeance de la résurrection de la contre-attaque : épisode III, 5ème partie. Si Batman begins, j’aimerais que Fast & Furious stops. Ainsi vit-on l’apparition, ces dernières années, des termes « remake » et « reboot ». Le premier, spécialité hollywoodienne, consiste généralement à reproduire un échec par un autre échec ayant coûté plus cher. De temps en temps, il leur arrive également de foirer des films à la base excellents. Histoire de ne pas flouer tout le monde. Le « reboot », quand à lui, permet de noyer le spectateur au milieu de divers univers différents où le héros  ne change pas, malgré qu’il ne soit pas le même et que son rôle reste identique, bien que modifié. Clair comme de l’eau de roche sortant du robinet. Existe également ce que l’on nomme les « adaptations », celle-ci se contentent de reproduire avec une minutieuse exactitude l’œuvre originale tout en s’autorisant quelques écarts aisément pardonnables comme modifier le titre, le scénario ainsi que le nom des personnages. Rien de bien méchant donc.

Ces dernières sont très souvent issues du milieu littéraire qui, vous vous en doutez − et l’avez même certainement remarqué − ne se gène pas pour surfer également. En tant que libraire  passionné, je déplore cette mode qui a fait naître une pléthore de sorciers orphelins aussi cons que leurs balais, de vampires transis d’amour pour une nénette à moitié zoophile, d’armées de zombies pas foutues de croquer trois péquenots boutonneux ou encore de jeunes pucelles ignorantes trouvant le véritable amour lors d’ébats sexuels sordides aussi érotiques que le salut nazi. Je vais finir par retourner ma bibliothèque aussi si ça continue. Parmi la prolifération pandémique de ces ouvrages d’une qualité approximative imitant les succès de titres plus anciens, l’on retrouve parfois d’excellentes sources − malheureusement rongées par divers parasites, comme je vous l’explique. Le plus significatif est notre cher Tolkien et sa quasi-légendaire Terre du Milieu, je dis quasi car combien de fois ais-je du expliquer à Monsieur Clio Tunée ou à Madame Secret Story que non, malgré ce qu’en pense Peter Jackson, il n’y a qu’un seul et unique tome de Bilbo le Hobbit et que son auteur n’en sortirai pas de nouveau depuis son décès en 1973. Je ne saurai dire combien d’elfes et d’orques sont tombés sous la plume de l’anglais mais au vu du génocide littéraire qu’ils subissent ces derniers temps, la guerre de l’anneau fait figure de règlement de compte entre bandes de quartier. West Side Story en costume d’époque, pas plus.

Je conclurai en vous rappelant que ces merveilleux récits sont régulièrement adaptés au cinéma par Hollywood, qu’ils passeront un jour sur votre télévision, que leur bande-son est réalisée par la paire de nichon star du moment, que vos enfants vont grandir avec cet ersatz de culture et que « surfer sur la vague », c’est tout un art (même s’il est mauvais).

 

Eldey H.