De tous temps, les études ont été un sujet sensible lors du repas familial hebdomadaire, notamment lorsque le fier patriarche est un victorieux vétéran de la résistance durant la seconde guerre mondiale et que vous désirez parfaire votre étude de l’allemand. Dans cette situation, je ne saurai trop vous conseiller de taire votre réel objectif et de lui expliquer que vous avez pour unique but d’espionner l’ennemi directement au cœur de ses frontières afin de mieux renseigner les forces alliées.

Le malheur de certaines familles est que seul un emploi d’avocat, de pilote de ligne ou de médecin est digne de leur progéniture. A ces gens, je leur dirai ceci : rassurez-vous, j’ai un ami plombier qui vient de se faire creuser une piscine de huit mètres sur dix et a changé sa voiture dans la foulée. J’ai également un autre ami, dealer pour sa part, qui vient de tout lui racheter.

Si votre enfant devient avocat, il se retrouvera après bien des années d’études à défendre ce genre d’individu louche, se fera certainement payer grassement pour ses services, et finira à la place de ses clients sur le banc des accusés. Si, par chance, il reste intègre et incorruptible, il se retrouvera à la place des clients de l’individu louche cité précédemment soit : dans sa voiture, au fond d’un fleuve, avec une bastos dans la caboche. Mauvais plan de carrière s’il en est.

En ce qui concerne le pilote de ligne, peu de chance d’être corrompu pour lui, hormis par les hôtesses, mais c’est un vice acceptable selon les prestations demandées. Cependant, le risque zéro n’existe pas et, même si les possibilités d’acte de terrorisme ne représentent qu’un pourcentage mineur d’évènements funestes, je rappelle que le café servi au-delà d’une certaine altitude est absolument infect et qu’une machine volante dont le nom ne comporte pas d’« L » me semble plus qu’inquiétant.

Reste donc le métier d’homme - ou femme, on leur autorise n’importe quoi ces derniers temps - de science. Je tiens avant tout à mettre au point une chose qui me semble importante : il est formellement interdit de se fier aux séries télévisées et à la littérature pour construire sa vie de médecin ou bien vous finirez schizophrène monstrueux, junkie asocial et handicapé physique, satire - ou nymphomane - détenant le record de nombre de divorce, acolyte d’un détective cocaïnomane, témoin d’une révolution russe, voyageur à travers l’espace-temps luttant contre diverses races extra-terrestres et à charge de trois enfants totalement inconnus que vous aurez adopté plus par idiotie que par charité. Celui qui me retrouve toutes les références aura droit à un café. Mais pas dans un avion. Ces précisions établies, nous pouvons débuter l’étude de ce merveilleux métier nécessitant tout autant sinon plus d’années d’études que celui d’avocat. Néanmoins, les cas de décès par propagation de la cervelle sur le pare-brise et le siège bébé sont moindres. Pour mériter votre superbe blouse blanche et le droit de mépriser les nouveaux medicinae studiosum, il vous sera demandé de perdre le maximum de sentiments humains, ceci afin d’éviter de dégobiller sur la scène de crime que les plongeurs de la police fluviale viennent de repêcher. Il était avocat parait-il. Egalement, votre chauvinisme occidental devra atteindre un degré suffisant pour suspecter tout forme de médecine venue de l’Est de charlatanisme parce que, c’est vrai quoi, il est impensable qu’une personne soigne quelqu’un avec une mixture douteuse à base de plantes tout aussi bien que votre dernière machine à réacteur atomique qui a, par ailleurs, causée de nombreuses manifestations dans les villes de votre beau pays. Une sombre histoire de fonds publics dilapidés. Je fermerai les yeux sur votre communauté à la limite du sectaire. J’en entends râler, je signale que vous faites partie de l’Ordre des Médecins et que vous prêtez un serment à la fin, ne venez pas me la jouer. Un serment, d’ailleurs, rédigé trois ou quatre siècles avant le barbu en robe de chambre et, donc, clairement obsolète : « Je mettrai mon maître de médecine au même rang que les auteurs de mes jours, je partagerai avec lui mon avoir et, le cas échéant, je pourvoirai à ses besoins ; je tiendrai ses enfants pour des frères, et, s'ils désirent apprendre la médecine, je la leur enseignerai sans salaire ni engagement. », ça vous arrange qu’il soit dépassé, avouez.

Je conclurai en rappelant que les médecins ont parfois besoin d’un avocat et, si celui-ci vient à trépasser soudainement, qu’ils doivent quitter le pays en avion, qu’Hippocrate était grec et, qu’avec son serment, ils peuvent aller se faire voir chez eux et qu’étudier la médecine, c’est tout un art (de gobelin).

 

Eldey H.


Rédigé dans le cadre du concours de fan'art de Gobblynne